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OCDE — Qualité des investissements directs étrangers en Tunisie

Des réformes ciblées pour accroître la contribution des IDE à la croissance

«En 2022, près de 3,5 % des entreprises privées en Tunisie sont à capitaux étrangers. Elles ont généré 11 % des revenus et employaient 21 % des travailleurs du secteur privé formel. Le quart des entreprises emploie au moins 50 salariés, contre 2 % des entreprises tunisiennes. 6,5 % d’entre elles comptent plus de 200 salariés. Les investissements étrangers opèrent dans leur grande majorité dans des secteurs comme les textiles, les machines, l’électronique ou les équipements automobiles». Il s’agit des chiffres avancés dans le cadre de la dernière revue de l’Organisation de coopération et de développement économiques. Certaines autres informations divulguées par ce travail méritent une véritable réflexion.

«La revue des qualités des IDE en Tunisie examine comment les investissements directs étrangers peuvent aider la Tunisie à atteindre les objectifs de développement durable dans les domaines de la productivité et de l’innovation, du commerce, de l’emploi et de la qualité des emplois et du développement des compétences », c’est ce qu’indique l’Organisation de coopération et de développement économiques (Ocde) dans sa dernière revue sur la qualité des IDE en Tunisie.

L’organisation indique que cette importante source de financement doit être davantage dynamisée et approfondie pour permettre aux investisseurs étrangers de participer à la prospérité en Tunisie.

1,5% du PIB en 2022

Ce travail expose les niveaux de contribution des IDE au développement et à la croissance en Tunisie. Avec la collaboration de l’Agence de promotion de l’Investissement extérieur, l’Institut national de la statistique, l’Autorité tunisienne d’investissement, l’Agence de promotion de l’industrie et de l’Innovation et l’Institut tunisien de la compétitivité et des études quantitatives, ainsi que divers spécialistes, l’Ocde fournit aux gouvernements les données, les outils et les normes nécessaires pour évaluer la contribution des IDE au développement durable et définir les politiques qui permettront d’accroître ses effets positifs.

Dans son travail, l’Ocde explique que « la Tunisie a fortement bénéficié de l’ouverture du commerce et de l’investissement et de l’intégration dans les chaînes de valeur mondiales (CVM). Les grandes réformes du climat des affaires, y compris ces dernières années et la création du régime offshore en 1972, ont conduit la Tunisie à attirer un volume important d’investissements directs étrangers ».

Par rapport à d’autres économies émergentes, la Tunisie bénéficie d’un ratio stock d’IDE-PIB élevé qui s’élève à 85 %. «Ce ratio a tendance à diminuer depuis 2012 », mentionne l’organisation. Et pour cause, les inconvénients économiques causés par la crise financière mondiale, les perturbations politiques internes et la pandémie de Covid-19.

Toujours selon la même source, les flux d’IDE enregistrés en Tunisie ne représentent que 1,5% du PIB en 2022. Un pourcentage faible par rapport à celui des années passées et aussi à celui enregistré dans la région Mena, où il représente 2,3%. Egalement, la part des exportations et des importations dans le PIB a atteint 111 % en 2022, soit deux fois plus que la moyenne de l’Ocde.

L’analyse de l’Ocde parle aussi d’une concurrence limitée qui entrave le dynamisme des investissements. Et pour cause, l’implication importante de l’État dans l’économie. Tout cela rend la productivité du travail modeste avec une tendance baissière depuis 2011. « La stagnation des IDE en Tunisie peut retarder les progrès vers les Objectifs de développement durable (ODD), car les entreprises étrangères sont susceptibles de créer de nombreux emplois, de verser des salaires plus élevés, d’être plus productives et mieux intégrées dans les chaînes de valeur mondiales », lit-on dans cette revue.

50% des IDE sont des micro-entreprises

Toutefois, il ne faut pas nier que la contribution des IDE au développement durable est importante, mais elle pourrait stimuler davantage la productivité et améliorer la création d’emplois.

En 2022, près de 3,5 % des entreprises privées en Tunisie sont à capitaux étrangers. Elles ont généré 11 % des revenus et employaient 21 % des travailleurs du secteur privé formel. Le quart des entreprises emploie au moins 50 salariés, contre 2 % des entreprises tunisiennes. 6,5 % d’entre elles comptent plus de 200 salariés. Les investissements étrangers opèrent dans leur grande majorité dans des secteurs comme les textiles, les machines, l’électronique ou les équipements automobiles. Celles de petite taille préfèrent investir dans les services, le domaine scientifique, technique, commercial ou les TIC.

Autre caractéristique, 50% des IDE sont des micro-entreprises, « peut-être des investisseurs de la diaspora tunisienne qui achètent des terres pour l’agriculture, construisent une maison ou créent une petite entreprise dans leur région d’origine, souvent des zones rurales, contrairement aux étrangers qui choisissent des centres urbains côtiers. La zone métropolitaine de Tunis a accueilli 67 % des entreprises étrangères et attiré plus de la moitié des IDE hors secteur de l’énergie entre 2013 et 2022 », annonce la revue de l’Ocde sur la qualité des IDE en Tunisie.

D’après la même source, les exportations effectuées dans le cadre du régime offshore de la Tunisie, créé en 1972, ainsi que les importantes réformes de libéralisation des années 1990 ont permis leur intégration dans les chaînes de valeur mondiales et ont appuyé le développement des IDE.

En 2021, les entreprises offshores, majoritairement européennes, représentaient 79 % de l’ensemble des entreprises étrangères et ouvraient dans les industries textiles et électriques-électroniques et d’appareils ménagers.

Néanmoins, le régime offshore a montré ses limites, puisque «les exportations étaient importantes et à faible valeur ajoutée dans un secteur offshore incapable de créer des emplois pour les jeunes hautement qualifiés et un secteur intérieur protégé», assure la revue de l’Ocde. «En 2021, ils ne se sont approvisionnés qu’à hauteur de 30 % auprès d’entreprises nationales, limitant les retombées en matière de connaissances pour les PME tunisiennes. La contribution des IDE à la création d’emplois est importante et l’une des plus élevées de la région Mena, mais elle se limite aux emplois peu qualifiés. Une main-d’œuvre abondante, jeune et qualifiée a fait de la Tunisie une destination attrayante en matière d’investissements ».

La productivité du travail des entreprises étrangères en baisse

Le nombre d’employés des entreprises étrangères a doublé depuis 2005. Toutefois, la plupart des possibilités d’emploi se trouvent dans des professions moins qualifiées. La création d’emplois grâce aux IDE dans les secteurs des services et des énergies renouvelables s’est accrue au cours de la dernière décennie. Les entreprises étrangères offrent davantage de formation en cours d’emploi que les entreprises tunisiennes. 

La plupart des travailleurs des entreprises étrangères sont des femmes, dans des proportions plus élevées que dans les entreprises tunisiennes, mais ces femmes occupent souvent des emplois mal rémunérés dans le textile ou dans le secteur du tourisme.

Au niveau national, la productivité du travail des entreprises étrangères a diminué de 17 % entre 2010 et 2022.

En 2022, les entreprises étrangères étaient 40 % à 50 % moins productives que les entreprises tunisiennes et les salaires qu’elles versent ne sont que légèrement plus élevés. Par contre, au niveau sectoriel, les entreprises étrangères sont plus productives et versent des salaires plus élevés dans la plupart des secteurs.

«Des réformes ciblées peuvent contribuer à accroître la contribution des IDE à une économie fondée sur la connaissance. La Tunisie a entrepris ces dernières années de vastes réformes du climat des affaires visant à mobiliser les investissements privés, notamment les IDE, dans le but de réduire l’important déficit de financement, de créer davantage d’emplois de meilleure qualité et de stimuler la productivité globale », rappelle la même source.

La loi sur les investissements de 2016 a libéralisé l’investissement. D’autres réformes législatives ont renforcé les droits des investisseurs, créé un environnement plus favorable aux investisseurs et réduit le fossé entre les entreprises étrangères et nationales. Un nouveau projet de code des changes devrait faciliter les transactions commerciales internationales. D’autre mesures ont été prises afin de réduire la dépendance à l’égard du régime offshore, avec pour objectif d’attirer les IDE et d’améliorer leur incidence sur le développement local.

Des mesures d’urgence

La revue de l’Ocde avance une série d’autres mesures qui restent à engager afin d’améliorer la contribution des IDE à la productivité, à l’innovation et à une meilleure création d’emplois pour les jeunes hautement qualifiés. La source propose, dans ce sens, l’amélioration de la cohérence des politiques en alignant la politique et la promotion de l’investissement sur la « Vision 2035 » de la Tunisie et sur les plans nationaux pour en faire une économie fondée sur les connaissances, avec le capital humain comme source d’innovation. Il a été également proposé de coordonner les efforts des différentes institutions pour atteindre cet objectif.

Il faut, par ailleurs, renforcer les efforts qui sont à même de « réduire la dichotomie entre les régimes offshore et onshore, afin d’étendre les motivations des investisseurs au-delà des activités à faible valeur ajoutée, à bas salaires et destinées aux exportations en zone franche vers des segments plus productifs de la chaîne de valeur et des secteurs de services qui créent des emplois pour les demandeurs d’emploi hautement qualifiés », lit-on sur la revue de l’Ocde. Cette même source propose de renforcer la concurrence, par la réduction des obstacles liés à l’investissement étranger dans certains secteurs comme les services aux entreprises et les TIC. Cela pourra dégager des gains de productivité à l’échelle de l’économie et de soutenir un secteur privé plus dynamique qui crée des emplois plus nombreux et de meilleure qualité. Pour conclure, il a été proposé de créer des mécanismes de surveillance et d’évaluation solides afin de mesurer l’incidence des IDE sur la productivité, l’innovation et les résultats du marché du travail. Cela favorisera l’anticipation des besoins en compétences des entreprises étrangères implantées en Tunisie.

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